Certes les Etats-Unis ne pourront pas ne pas se réjouir officiellement, en voyant leurs alliés commencer à combler l'une des principales lacunes capacitaires qu'ils leur reprochent depuis si longtemps. Mais ce n'est que la façade. L'A400M est un concurrent et un outil d’autonomie
européenne comme ils ne les aiment pas. Un article
du Washington File du Département
d’Etat datant de 2006 précise déjà que « Les US recommandent aux alliés
OTAN de mettre en commun de l’argent pour acheter des C-17 ». Une solution
présentée comme bénéfique pour les affaires de Boeing et qui serait du même
coup la meilleure façon de pallier les carences des Européens en matière de transport stratégique.
Dans
l’espoir d’écarter d’avance l’option A400M, l’article tient à souligner que la
capacité de transport de l’avion européen n’est qu’un tiers de celle de son
concurrent américain. Et pour ceux qui n’auraient pas compris la consigne, il
précise également que « l’Airbus européen et le Boeing américain sont des
rivaux commerciaux ». Comme argument de vente, on cite aussi la
Représentante US à l’OTAN qui se fait un plaisir de remarquer que « Si le
prix est si bas, c’est parce que l'Amérique en achète beaucoup ». Dernière
petite touche : un sentiment d’urgence. Vite, il faut s’y engager sinon
l’offre disparaît et/ou le prix augmente.
Episode révélateur en octobre 2008: quand
les ministres de la défense de l’UE se réunissent à Deauville, pour parler du
partage des futurs A400M, l’OTAN choisit d’annoncer au même moment le
lancement de son programme de « capacité de transport stratégique », qui
regroupe alors 11 pays européens autour de l'Amérique et du C-17 de Boeing,
justement. C’était aussi la période pendant laquelle le programme A400M
traversait de sérieuses turbulances…
Comme toujours, Washington veut d’abord convaincre les Etats européens un
par un de ne pas participer du tout à un projet européen d’importance
stratégique (et il y réussit, dans le cas de l'A400M, pour le Portugal et l’Italie). Ensuite il s’emploie sans relâche à montrer qu’il existe à portée de main une séduisante alternative transatlantique. Logiquement, une fois devant le fait accompli, l’étape prochaine sera
d’encourager le rapprochement/fusion entre les structures européennes de
coordination en matière transport aérien militaire et celles d’OTAN. De manière
à s’assurer un droit de regard et préserver son contrôle au maximum sur d’éventuels
futurs développements.
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