La
question
écrite d’un Sénateur, adressée au ministre de la Défense, est l’occasion
pour revenir sur la
décision récente de la France d’amputer sérieusement la Brigade
franco-allemande (BFA). Notamment par la dissolution du 110e Régiment
d'Infanterie stationné à Donaueschingen, qui en faisait partie intégrante.
Surtout que l’on doute fortement que, dans sa réponse, le Ministre puisse
exposer tous les arguments de son (double) raisonnement.
A première vue, il s’agirait de l’exemple type du mauvais message au mauvais moment. A l’approche du sommet « Défense » de décembre, où la France entend plaider en faveur d’un renforcement de l’Europe de la défense, pourquoi cette décision choc contre une formation franco-allemande toujours considérée comme l’embryon potentiel de quelque chose de plus significatif ?
D’autant plus que la Brigade incarne déjà tout ce que la PSDC (Politique de sécurité et de défense commune de
l’UE) cherche désespérément depuis des années. Elle est opérationnelle, dotée
d’importantes capacités de combat, composée de forces entraînées ensemble et
hautement interopérables. De surcroît, une véritable dimension européenne est
inscrite dans son ADN, comme en témoigne la présence d’éléments additionnels
belges et espagnols autour du noyau franco-allemand.
Sauf qu’elle n’a
jamais été déployée sous le drapeau européen, justement. Et ce n’est pas faute
d’avoir essayé, du côté de la France. Dernièrement, l’Allemagne aurait refusé
par deux fois l’engagement de la Brigade au Mali, et pour l’opération Serval,
et pour la mission d’entraînement de l'UE (EUTM Mali). Dans ce contexte, une
remarque, d’apparence paradoxale, du ministre Le Drian prend tout son sens.
Notamment lorsqu’il dit espérer que la dissolution de l’unité puisse contribuer à « renforcer les
perspectives d’emploi [de la Brigade] au profit de la défense européenne ».
Vu sous cet angle,
il s’agirait de faire pression sur la partie allemande afin qu’elle consente à
des déploiements réels sous enseigne européenne. Sinon, pour Paris, ce n’est pas la
peine. Ultime avertissement. Du moins, c’est la lecture optimiste que l’on
pourrait faire des intentions françaises. Son pendant pessimiste dirait qu’il
s’agit tout simplement d’une mesure d’austérité comme les autres, faisant fi de
l’Europe, tout comme des symboles. La Cour des comptes ne se serait-elle pas
interrogée elle-même sur la « rentabilité » de la Brigade ?
La vérité est sans
doute un mélange des deux. Paris voudrait mettre la pression sur Berlin et faire des économies en même temps. Si les pressions marchent, des déploiements
suivraient et la Brigade pourrait devenir une locomotive (à la fois symbolique
et opérationnelle) pour combler les lacunes de l’Europe de la défense. Sinon,
ce serait autant d’euros sauvés pour « l’intendance ».
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