Pour résumer la cinquantième édition de
l’inoxydable Wehrkunde (conférence
de sécurité, organisée chaque année à Munich, avec la participation de la crème
de la crème transatlantique), le moins que l’on puisse dire, c’est que les
responsables américains ont caressé leur auditoire, européen pour la plupart,
dans le sens du poil. Ce qui fut prévisible, pour ne pas dire normal.
Conformément à la dynamique
familière des relations Europe-Amérique, l'épisode de la brouille
NSA/Snowden devait être suivi de gestes de réconciliation poussés jusqu’à l’extrême. C’est maintenant chose faite. Grâce à la prestation
remarquable du Secrétaire d’Etat Kerry et du patron du Pentagone Hagel (John
et Chuck, pour les intimes), les Européens peuvent donc continuer de
se bercer d’illusions et se rêver en partenaires des Etats-Unis. Chapeau
l'artiste.
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Bien joué... (crédit: Reuters) |
Le numéro à deux, orchestré à la perfection,
correspondait exactement à ce que l’auditoire euro-atlantiste attendait depuis
un bon bout de temps. Traumatisés par la menace d’un désintérêt possible des
USA pour l’Europe, brandie par l’ancien chef du Pentagone en 2011, puis par
l’annonce officielle du « pivot » vers
l’Asie en 2012, puis par l’affaire des écoutes de la NSA l’an dernier, les
braves responsables européens mouraient d’envie d’entendre des propos
rassurants de la part de leur grand allié et ami. Et ils ont été servis.
Les deux Secrétaires sont « venus
en toute humilité », et admis d'emblée que même en Amérique, « la
démocratie est un chantier en cours ». Pour ce qui est de la
baisse des dépenses de défense, objet de sempiternels reproches adressés aux
alliés européens, ils ont pris le soin de préciser, à plusieurs reprises, que les
Etats-Unis doivent faire face à une situation similaire (bien entendu, à leur
échelle). Le problème est donc commun aux deux rives de l’Atlantique. Par
conséquent, il convient de s’unir de manière toujours plus étroite pour relever
les défis.
De toute façon, dans un contexte où « pas
un seul pays ne pourrait espérer de résoudre les problèmes » qui
se posent aujourd’hui, « l’Europe est un partenaire indispensable
pour les Etats-Unis ». L’ouf de soulagement fut presqu’audible parmi
les invités à Munich. Les responsables US le disent et le redisent à volonté
(et le prochain QDR ou Quadrennial Defense Review, document-cadre de la défense
américaine, va bientôt le confirmer) : consciente que l’isolationnisme « n’est
pas une option », l’Amérique revalorise les alliances et croit dur
comme fer à « l’indivisibilité de la sécurité et de la
prospérité » de part et d’autre de l’océan. Bref, un vrai conte de fées pour enfants. Lequel a failli faire oublier les petites mises en garde glissées, mine de rien, dans ce beau discours d'amitié.
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